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La langue

Autrefois, l’aire de Vanikoro était divisée en trois tribus, chacune avec sa langue bien distincte : le
teanu au nord-est ; le lovono à l’ouest, et le
tanema au sud [carte]. Durant le xx
me siècle, ces deux dernières langues se sont pratiquement éteintes, remplacées par le teanu.
La tribu lovono était centrée autour d’un village aujourd’hui abandonné, sur la côte nord de l’île de Banie (la principale île de Vanikoro). Ce village est nommé “Lovono” en teanu, et “Alavana” dans la langue locale (le lovono). Des sources écrites du xix
me s. (Dillon 1824, Gaimard 1834) ont appelé ce lieu Vanou or Whanou. Lorsqu’il fut abandonné, sa population migra vers les nouveaux villages de Lale [NO] et Lovoko [N].
Quand le naturaliste français Gaimard publia en 1834 les premières listes de mots dans les trois langues de Vanikoro, il se concentra sur la langue de l’ouest, le lovono, qu’il nommait d’ailleurs “le vanikoro”.
Le lovono, le tanema et le teanu, les trois langues autochtones de Vanikoro, sont océaniennes : elles appartiennent donc à la vaste famille des langues austronésiennes, laquelle couvre la plupart des îles du Pacifique. Au sein de la famille océanienne (≈500 langues), les langues de Vanikoro appartiennent à la branche “Temotu” – un petit groupe d’une dizaine de langues, situé dans la province du même nom.
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Le corpus lovono
2.1 Le terrain
Le linguiste Alexandre François s’est rendu deux fois à Vanikoro, chaque fois en lien avec un projet pluridisciplinaire.
En 2005, l’expédition Lapérouse 2005 fit venir de Nouméa une centaine de participants, en quête du souvenir concernant le navigateur français Jean François de Lapérouse – dont les deux navires se brisèrent en 1788 sur les côtes de Vanikoro. Tandis que les archéologues sous-marins plongeaient en quête des vestiges concrets des deux navires, François parcourait les villages de l’île, en apprenait les langues, et enregistrait des récits de la tradition orale au sujet de ces navigateurs français qui avaient, les premiers, échoué à Vanikoro.
François eut l’occasion de revenir en 2012 dans le cadre d’une expédition de géologues de l’IRD, qui étudiaient les changements dûs à l’activité sismique et au réchauffement climatique. Le linguiste saisit cette opportunité pour enrichir ses connaissances sur les deux langues moribondes de l’île, le lovono et le tanema.
Le dernier homme à parler couramment le lovono était alors Rubenson Lono (1933-2020). Feue son épouse était elle-même l’une des dernières locutrices du tanema, l’autre langue moribonde de Vanikoro. Le fils qu’ils eurent ensemble, Lainol Nalo, a hérité la langue de sa mère et non celle de son père ; c’est ainsi qu’en 2012, Rubenson Lono était le dernier locuteur du lovono, et son fils Lainol le dernier locuteur du tanema.
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2.2 Le corpus
La présente archive lovono inclut trois récits issus de la tradition orale de Vanikoro, tous narrés par Rubenson Lono.
Un des enregistrements est la légende de Lapérouse (en lovono, Toñaki ie Laperus “le navire de Lapérouse”) : partie 1, partie 2. Lono y raconte comment les deux navires furent magiquement anéantis par les Dieux de l’île.
Parmi les autres récits (non encore traduits), figure l’origine de l’arbre kaori – un mythe qui figure également dans le corpus teanu.
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Bibliographie
François, Alexandre. 2008. Mystère des langues, magie des légendes. In Le mystère Lapérouse ou le rêve inachevé d’un roi, edited by Association Salomon. Paris: de Conti, Musée national de la Marine. 230-233.
François, Alexandre. 2009. The languages of Vanikoro: Three lexicons and one grammar. In Bethwyn Evans (ed). Discovering history through language: Papers in honour of Malcolm Ross. Pacific Linguistics 605. Canberra: Australian National University. 103-126.
François, Alexandre. 2021. Online Teanu–English dictionary, with equivalents in Lovono and Lovono. Publication électronique. Paris: CNRS [https://tiny.cc/Vanikoro-dict].
Pour en savoir plus sur les langues de Vanikoro : https://tiny.cc/Vanikoro-lgs.
Voici comment vous pouvez citer cette archive Pangloss :
François, Alexandre. 2021. Archive d’enregistrements de terrain dans la langue lovono. Collection Pangloss. Paris: CNRS.